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Léo Ferré
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Les vieux copains

Les vieux copains
Tout ridés fatigués
Qui vous tendent la main
Après bien des années

Les vieux copains
Que l'on voit s'en aller
En s'tenant par la main
Pour ne pas culbuter

Les vieux copains
Qu'ont les yeux comm' les cieux
Quand les cieux sont tout gris
Et qui voient pour le mieux

Les vieux copains
Tout salis par le temps
Qui n'est plus qu'à la pluie
Quand il pleut dans les yeux

J'suis un d'ceux-là mon Dieu !
Donnez-moi des jardins
Pour cueillir la jeunesse
Pour couper les années
Pour en faire des tresses
Pas ma jeunesse à moi
Ell' n'était pas heureuse
Mais celle que voilà
Dans les bras d'une gueuse
Avec ses seins trahis
Sous la robe trompeuse
Avec le reste aussi
Et croyez-moi, Petite
J'étais souvent gentil
Avec le coeur devant
Et mes rêves dedans

Les vieux copains
Qu'on avait cru des fois
Prendre l'or de leur voix
Pour t'offrir un bijou

Les vieux copains
Qui te prenaient le temps
Pour se faire un printemps
Et t'en donner un bout

Les vieux copains
Qu'ont le passé passé
Dans leurs pas trop pressés
A marcher sur l'Amour

Les vieux copains
Qui disent « Comment vas-tu »
Et qui ne savent plus
Ni leur nom ni le tien

J'suis un d'ceux-là mon Dieu !
Rendez-moi la Folie
Celle que je cachais
Dans le fond de mon lit
Lorsque la nuit venait
Et que je dénonçais
Dans le froid du silence
Les raisons de la chance
A faire que la vie
Se raconte ou se vit
Ça dépend du talent

Qui se donne ou se vend
Quand on a décidé
D'écrire ou de chanter
L'Amour et l'Amitié
Qui ne font que passer

Les vieux copains
Que je ne r'connais plus
Qui passent dans la rue
En traînant des chagrins

Les vieux copains
Tout courbés par le temps
Quand le temps est au Nord
Quand le Nord est d'accord

Les vieux copains
Qu'ont des rides souillées
Par des larmes séchées
A travers les années

Les vieux copains
Qui mangent à la Sécu
Et qui ne savent plus
Où est l'Quartier Latin

J'suis pas d'ceux-là mon Dieu !
Je vous rends la passion
Que vous m'avez prêtée
Un jour de déraison
Pour croire à vos conn'ries
Pour croire à vos enfants
Alors que cette vie
N'est fait' que d'un instant
J'naîtrai demain matin
Quand les chevaux vapeurs
De tous mes vieux copains
S'électriseront
Et réinventeront
Dans leur âme fânée
Les roses de l'Enfer
La Folie du plus Fou

Et tous ces vieux copains
Se mettront à chanter
Camarades, électrisons-nous !
Et si quelques étoiles
Veulent nous voir
On pourra toujours leur prêter

Quelques VOLTS en supplément

Et alors... et alors...

Elles nous verront DEBOUT
Avec nos mains dans leurs coutures

Camarades


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